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» » ITV MAG : PSYCHOLOGIES
jeudi 17 septembre 2020

# ITV MAG : PSYCHOLOGIES

EN TÊTE À TÊTE


 

Que vont chercher les marins dans cet exercice extrême qu'est la course au large, seuls, loin de tout, de tous, dans un environnement parfois hostile ? Comment appréhendent-ils cette solitude, ce stress permanent ? Comment s'y préparent-ils ? Que viennent-ils chercher ? Qu'y trouvent-ils ? Pourquoi y retourner ?
Eric Péron nous livre ici quelques réponses...

 

 

Es-tu un solitaire dans ta vie de tous les jours ? 

Non pas trop finalement. J'aime bien être seul quand je suis en phase de repos, mais globalement, l'aspect social me plaît, je trouve ça très enrichissant. Je navigue en solitaire mais c'est un gros travail d'équipe. C'est d'ailleurs tout le paradoxe du marin en solitaire, mais qui est très entouré et cherche à partager ce qu'il vit avec le plus grand nombre.

 

Est-ce que le Eric, homme à terre, est différent du marin en mer ? 

Arf bonne question... Je pense que oui : en mer, on est en mode compétition et forcément on se transcende un peu. Mais sinon sur la gestion de ma vie courante de marin à terre, il n'y a pas beaucoup d'écart. Mon métier passion transpire beaucoup sur ma façon d'être au quotidien, avec mes proches.

 

 

Comment appréhendes-tu la solitude ?

La solitude me fait " peur " parce que j'aime foncièrement la relation humaine. Imaginer que je puisse être seul, loin de tout, sans communication, pourrait être une source de stress, mais c'est finalement très loin de la réalité, de ce que je vis à bord.

 

Est-ce que c'est naturel chez toi ?

J'ai appris en grandissant que la solitude fait partie de l'ennui et que l'ennui fait partie de la vie : apprendre à s'ennuyer c'est presque apprendre à vivre.

 

Est-ce que tu recherches quelque chose de particulier ou qu'apprécies-tu en particulier dans le fait de courir en solitaire ?

Le paradoxe ultime du solitaire, c'est qu'on a envie de partager le plus possible notre propre expérience. J'apprécie énormément être en solitaire parce qu'on se retrouve vraiment face à soi-même. C'est un défi extraordinaire que de devoir absolument tout gérer et c'est aussi hyper plaisant.  Sur les navigations en équipage, il y a une émulation constante, qui est hyper enrichissante parce qu'on apprend de l'autre. En solitaire, on apprend par soi-même et les sensations sont décuplées.

 

As-tu ou avais-tu des choses à te prouver à toi-même ?

Oui sûrement, tout au long de ma vie, de ma carrière, j'ai dû essayer de me prouver que j'étais capable de faire, seul, sans l'aide de personne. C'est sûrement un travers que j'ai cultivé, il doit y avoir un peu de ça au fond de moi, oui.

 

Te sens-tu parfois en solitude sur ton bateau ?

C'est très rare ; en réalité, je n'en ai pas de souvenir. Si je trouve le temps long, c'est davantage lié à des conditions pénibles ou parce que je suis loin de l'arrivée.

 

Est-ce que naviguer en solitaire fait grandir, rend différent ?

Savoir gérer seul les situations compliquées, extrêmes, dangereuses, évidemment ça construit. Ça construit du sang-froid, une méthode. Forcément ça nous sculpte.

 

Le bateau, c'est froid ou très chaud, humide, dur, fatigant, éprouvant, émotionnant... pourquoi y retourner ? Y a quand-même un petit côté maso, non ? ;-)
Ah ah oui c'est un cocktail de contraintes ! Mais c'est le lot de tous ceux qui font des sports extrêmes qui demandent un engagement important ; Tout ça, c'est à cause d'une espèce d'hormone qu'on appelle l'adrénaline ! Je pense qu'on a besoin de nos shoots réguliers. Il y a des sports bien plus extrêmes, intenses parce que très courts dans le temps. Avec la course au large, on a notre adrénaline sous perfusion tranquillement, tout le temps. Et non, je ne suis pas maso [rires]. Comme le corps humain est bien fait, l'espèce a développé un bouton "reset" pour effacer, avec le temps, les mauvais souvenirs, c'est quand-même très pratique;-)

 

Comment gère-t-on le stress sur un multicoque ?

Effectivement, le multicoque est par nature assez stressant parce qu'il peut se retourner. Tout au long de notre carrière on apprend ça tranquillement en déplaçant progressivement le curseur de notre seuil de stress jusqu'à réussir à l'inhiber ou du moins à l'apprivoiser. Souvent, l’expérience, le fait d'avoir déjà vécu la situation, d'être dans le connu, permet de mieux appréhender les situations. La méthode, pour moi, c'est d'aller chercher ces situations à l'entraînement pour justement déverrouiller la peur et donc le stress qui pourraient y être associées. Après, il y a le stress de la compétition qu'on se donne aussi soi-même par rapport à un résultat, un objectif. Je crois que ce n'est pas trop mon cas ; en tout cas, ça se prépare et la prise de conscience est sûrement la première phase de désamorçage du stress.

 

Profites-tu de moments de contemplation à bord ?
C'est très dur, en solitaire, de prendre le temps de contempler parce qu'on a souvent la tête dans le guidon et qu'on est toujours inquiet de quelque chose. Mais j'essaye de plus en plus de prendre du recul sur ce qui est en train de se passer.  C'est marrant, c'est plutôt à travers le besoin de communiquer et l'envie de partager qu'on remarque, qu'on voit qu'il y a une belle lumière, un lever ou un coucher de soleil, un oiseau... dans ces moments-là, tu attrapes ta caméra. Ça, pour moi c'est le signal ; le moment ou tu te dis : "oui fais ta photo, mais surtout, prends le temps de contempler...regardes, c'est beau ! "

 

 

 

 

 



 

 

 

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